Tony Conrad

recueil de sutures ◊ 8 juillet à 13 novembre 2023 << english/français >>

“La suture coronale du crâne (ce qui, certes, resterait à étudier) présente – faisons cette hypothèse – une certaine analogie avec les ondulations serrées que la pointe d’un phonographe trace dans le cylindre récepteur en rotation. Supposons maintenant que l’on induise ce stylet à l’erreur, et qu’au moment de la restitution on le conduise sur une piste qui ne résulterait pas de la transposition graphique d’un son, mais existerait elle-même à l’état naturel – allons, n’hésitons pas à le dire! -, qui serait précisément la suture coronale : que se passerait-il? Il devrait se produire un son, une succession de sons, une musique…
Des sentiments – lesquels? l’incrédulité, l’appréhension, la crainte, le respect : lequel donc de tous les sentiments possibles ici m’empêche de proposer un nom pour le bruit premier qui apparaîtrait alors dans le monde…?”

Texte de Rainer Maria Rilke, Bruit premier (1919), traduction R. Colombat – Œuvres en prose, Gallimard, Paris, 1993.
The Flicker de Tony Conrad (1966, 16mm), courtesy The Film Gallery, Paris.

image : Contre dance 33, Recueil de Dances, M. Pécour, 1709. BnF Gallica.